J'ai ressorti mes "vieux" cours et TD de Fac (que de souvenirs ! ...), lu diverses publications sur la géologie du boulonnais (faut s'accrocher !), ainsi que certains sites incontournables comme celui de JP Magniez de l'académie de Lille, et je vous propose cette petite synthèse relatant les grandes lignes de l'histoire géologique du boulonnais :
Un
résumé
de l’histoire géologique du boulonnais
:
La
région de Boulogne, telle que nous la connaissons aujourd’hui, est le résultat
d’une longue évolution dans l’espace et dans le temps.
Au
début du Paléozoïque inférieur (Cambrien, ordovicien, de –540 à
– 435 Ma), la région est un élément d’une grande bande de terre appelée
Avalonia, située à l’emplacement actuel de l’Antarctique, c’est à dire
à proximité immédiate du pôle Sud.
Pendant
tout le Paléozoïque moyen (Silurien, dévonien, de –435 à –355
Ma), la région migre des hautes latitudes vers les basses latitudes (par le jeu
de la dérive des continents), et s’est accolée entre-temps à un autre bloc
continental Baltica pour former un paléocontinent nommé Laurenropa ou Eumarica,
situé à cheval sur l’équateur.
C’est
ici que débute notre histoire, celle des roches visibles sur le terrain :
La
formation de la chaîne hercynienne.
Au
Dévonien moyen (givétien et frasnien –375 Ma), on assiste à une
transgression (avancée) de la mer sur l’ancien massif calédonien érodé.
Une mer de faible profondeur et chaude (plate forme continentale) se met en
place sur la région. Ces dépôts sont successivement détritiques (poudingues
et grès de la Formation de Caffiers), carbonatés (Formation de Blacourt) puis
terrigènes (Formation de Beaulieu).A cette époque se développent des récifs
construits par des tabulés et des tétracoralliaires (actuellement exploités
comme marbres à la carrière du banc noir et du griset, et ex-carrière de la
parisienne), des stromatolites et des évaporites. Des petites variations des
conditions faisaient que quelquefois les récifs étaient détruits lors de tempêtes
ou mouraient sous des dépôts d’argile. Ce sont les plus anciens dépôts sédimentaires
directement accessibles dans le boulonnais.
A
la fin du Dévonien (fin du frasnien et famennien –360 Ma), sous
l’influence de phénomènes tectoniques, la mer se retire progressivement de
la région, et le boulonnais est caractérisé par la présence de vasières et
de dépots détritiques (formation de sainte godeleine).
Au
Carbonifère (-360 à – 290 Ma), une chaîne de montagne se forme en
Europe moyenne, la chaîne hercynienne, au sud du boulonnais notamment (zone de
subduction dans le massif central). Cette chaîne de montagne résulte de la
formation d’un super-continent unique, la pangée, suite à la rencontre entre
le continent Laurussia au nord et gondwanna au sud. Ces mouvements tectoniques
provoquent des déformations importantes dans la région (failles, plis) qui émerge
totalement au carbonifère supérieur. La sédimentation alors carbonatée au
tournaisien et viséen (milieu marin peu profond et lagons à salinité
variable, récifs moins développés qu’au dévonien et construits par des
cyanobactéries ou algues bleues = « marbre Napoléon » ou rubanné)
devient continentale (stéphanien –300 Ma, dépots de grès) La mer laisse
place à d’immenses marais équatoriaux peuplés d’insectes, d’araignées,
de mille-pattes géants évoluant au cœur d’une forêt luxuriante. Cette
vaste forêt de fougères arborescentes sous climat tropical, est à l’origine
de la formation des couches de houille : les végétaux qui prolifèrent
dans les marécages au pied des hautes montagnes sont régulièrement noyés
sans être décomposés, ils formeront les couches de houille. Des traces de
cendres volcaniques témoignent de la présence de volcans à proximité.
Une
longue période d’émersion :
Au
Permien (-290 à –225 Ma) : L’orogénèse hercynienne est terminée,
et la région subit une intense érosion sous climat tropical et aride (faciès
nouveaux grès rouges). Le boulonnais finit par ressembler à une pénéplaine,
à un vieux massif aux reliefs bien abaissés
Au
Trias (-225 à –180 MA) : n’affleure pas, seulement en forage
Franche
transgression de la mésogée au sud et à l’est. La région de boulogne est
évitée cependant.
La
mer du Muschelkalk n’est pas très loin (au sud vers Paris, à l’est vers
les ardennes)
La
transgression timide de la mer jurassique.
Au
Jurassique (-180à –135 MA) [grès, argiles, marnes, calcaires avec
ammonites, lamellibranches…]
Après
110 Ma d’émersion, la mer transgresse au début du jurassique sur
l’ancienne chaîne hercynienne fortement arasée. La transgression vient à la
fois du nord (mer boréale) et du sud (mésogée) et ces deux avancées de la
mer se rejoignent à la hauteur du boulonnais au lias (jur <). Elle recouvre
les abords du boulonnais et les ardennes. La région lilloise, le nord des
ardennes, le massif schisteux rhénan et le massif central restent émergés.
Boulogne a alors l’aspect d’un golfe faisant face à un continent à
l’ouest (d’une ligne de côte allant des pays de galles au Portugal en
passant par la bretagne). A l’est existe également un grand continent qui
correspondrait à la russie actuelle.
La
transgression progresse sur le boulonnais et l’europe de l’est pendant tout
le jurassique, mais dans la région, seul le boulonnais sera envahi par la mer
jurassique. En effet, 3 îles subsistent encore au cœur de l’europe :
l’actuel massif central, l’ensemble ardennes vosges forêt noire massif
schisteux rhénan auquel appartient la région lilloise, et le massif ukrainien.
Le
niveau des mers est alors d’une centaines de mètres supérieur à l’actuel.
A
la fin du Jurassique, début du Crétacé (pendant 30 Ma, de –140 à –110
Ma), la mer quitte la région et le continent européen est abandonné par cette
mer épicontinentale qui regagne ses bastions : la mésogée au sud, et la
mer boréale au nord. Les dépots laguno-lacustres de la fin du jurassique (faciès
purbeckien) et l’émersion nette au début du crétacé (faciès wealdien :
niveaux argilo-sableux résultant de conditions deltaïques et lacustres avec de
nombreux dinosaures herbivores comme iguanodons) attestent un retour à des
conditions continentales.
La
fin du jurassique est également marquée par un épisode tectonique :
boulogne appartient à cette époque à la microplaque angleterre brabant, qui
par conséquence de la formation du rift atlantique nord, coulisse vers
l’ouest le long de la plaque méridionale bretonne).
La
grande transgression du crétacé (-135 à –65 Ma) :
Dès
le début du Crétacé, Aptien, Albien (-110 Ma) l’amorce d’un retour
de la mer par le Nord et le Sud (qui durera 45 Ma) sur la région boulonnaise se
fait ressentir (nodules phosphatés, argile de gault et sables à glauconie,
nodules phosphatés et ammonites pyriteuses) et le boulonnais est alors à
nouveau envahi par la mer.
Dès
le cénomanien (-115 Ma) et jusqu’au danien (-65 Ma) , la mer réalise
cependant une franche transgression sur le boulonnais (pendant 40 Ma) mais également
sur la région lilloise (qui aura donc été émergée 190 Ma !) et le
reste de l’europe (sauf les 3 îles déjà présentes au jurassique).
Fait
historique, le niveau de la mer est de 300 m supérieur à l’actuel, et la
quasi totalité de l’europe est recouverte d’une mer épicontinentale, la
mer de la craie, sédiment principal de cette période et élément essentiel du
sous-sol de notre région.
La « terre à Dinosaures » se transforme en « mer de la craie ».
Cette mer était calme, peu profonde et abritait une faune nombreuse (éponges,
oursins, coquillages, poissons, ammonites, reptiles marins …).
La
mer se retire ensuite de la région et de l’Europe il y a 65 Ma.
Dernière
transgression à l’éocène : (-65 à –45 Ma)
La
zone du boulonnais présente une sédimentation assez détritique soulignant une
érosion importante. La région se surrélève légèrement. Il s’agit alors
d’une zone de haut fond (prolongement de l’anticlinal faillé de l’artois)
séparant le bassin de paris au sud et le bassin belge au nord avec des émersions
temporaires. La mer vient du Nord il y a –50 Ma (transgression Paléocène),
repart, revient pendant 20 Ma, mais butte sur les reliefs de l’Artois qui s’élèvent
à cette époque.
Emersion
définitive au Tertiaire depuis 40 Ma :
Par
contre-coup de la formation des alpes, il y a élargissement de la zone émergée
de l’artois par légère remontée des reliefs au Miocène (- 25 à
–12 Ma). Régression de la mer vers la Manche pour le bassin de Paris et vers
la mer du Nord pour le bassin Belge.
Le
Quaternaire (les 2 derniers Ma) :
Marqué
par la succession de périodes glaciaires et interglaciaires.
Formation
du détroit du Pas de Calais il y a 900 000 à 800 000 ans par formation
d’un graben (effondrement).
Forte
baisse du niveau de la mer de 100 m à la dernière glaciation Wurm (début il y
a 100 000 ans) à cause de l’extension des glaciers (à quelques
centaines de km seulement au Nord de Boulogne). Emersion d’une partie de la
mer du nord et de la manche (seine et rhin se rejoignent). Beaucoup de dépots
de loess ou limons (particules argilo-calcaires arrachées par les vents
violents autour des glaciers).
Dernière
timide transgression flandrienne il y a 12 000 ans à cause de la fonte
des glaciers (ex : falaise fossile de sangatte) très très limité dans le
boulonnais.
Tourbe
fossile à la pointe aux oies et Ambleuteuse datée de –5 000 ans à –3
000 ans montrant un niveau des eaux inférieur de 4m à l’actuel
(formation d’une tourbière emprisonnée entre les falaises à l’Est et un
cordon littoral à l’Ouest, comblée ensuite par des sédiments et la dune.
C’est le recul actuel de la dune qui permet d’apercevoir la couche de tourbe
dans sa partie Ouest).
© TERRAVITA, Frédéric BLASSELLE.